Réflexions sur le projet Mobilités de Tisseo
Le lundi 25 juillet 2016, Jean-Luc Moudenc a dévoilé le plan de financement de son projet de transports en commun. Cette échéance avait été maintes fois repoussée, ce rendez-vous était donc attendu. Le projet phare de la campagne de JL. Moudenc était entamé dans sa crédibilité, en l'absence d'une explication précise des modalités de financement de la 3ème ligne de métro.
La 3éme ligne de metro, un projet seduisant qui pourrait constituer un acte 2 du Plan de Déplacements Urbains (PDU)
Tout d'abord, il faut reconnaître qu'un élu écologiste ne peut balayer d'un revers de la main la proposition de réaliser une infrastructure de transport en commun de cette ampleur, capable de relier les bassins d'emploi du Nord-Ouest et du Sud-est toulousain. Cette proposition de création d'une nouvelle ligne mérite d'être examinée avec la plus grande attention. Nous pourrions envisager de travailler aux côtés du Maire de Toulouse et des élus de la Métropole pour examiner les conditions selon lesquelles ce métro pourrait constituer un acte II du PDU actuellement en vigueur, et ainsi compléter le schéma de transports dans un horizon qui reste à déterminer.
La menace de la disparition des projets inscrits au PDU
Malheureusement, les éléments présentés le 25 juillet laissent présager une suppression pure et simple des projets actuellement inscrits dans les projets d'urbanisme, et qui ouvraient la possibilité pour les décideurs politiques qui succéderont à Jean-Luc Moudenc de développer un schéma de transports en surface à même d' irriguer toutes les villes de la métropole. Les projets en site propre qui permettaient de poursuivre la boucle de tramway, de desservir Tournefeuille, Plaisance du Touch, Saint-Orens, Portet et bien d'autres communes sont purement et simplement rayés de la carte et leur réalisation ne sera plus possible pendant des décennies. Si cette proposition était confirmée, ce serait une catastrophe pour l'avenir des transports en commun et les conséquences en seraient ressenties pour une décennie. Les victimes collatérales de la promesse de campagne de M. Moudenc seraient les communes de la périphérie et les zones de faible densité urbaine.
Une stratégie financière qui préfigure un ralentissement de l'offre de transport pour les 10 ans qui viennent
Les propositions formulées sont claires sur ce point. M. Moudenc considère que Tisseo coûte trop cher et que sa rentabilité doit être augmentée, sous peine de compromettre la possibilité d'investir les 2 milliards recherchés pour la 3ème ligne de métro. L'argument peut s'entendre et l'efficacité du service public doit être recherchée chaque fois que nécessaire. Il y a certainement des lignes de bus à optimiser, des réorganisations qui seraient nécessaires. Mais pour le coup, l'utilisation de ces arguments peut sembler idéologique de la part d'un Maire qui a plaidé pour la privatisation des transports il y a 10 ans, et pour un réseau qui se situe à un niveau de rentabilité identique à ceux des grandes agglomérations, malgré un territoire à desservir d'une très faible densité.
En vérité, on peut craindre pour l'avenir une baisse des amplitudes horaires, une réduction de l'offre pour des lignes qui desservent les territoires les plus excentrés de la ville centre. Cette stratégie est à manier avec prudence car on sait que l'attractivité d'un réseau de transport est liée à sa facilité d'usage. Nous ne parviendrons pas à convaincre des automobilistes de délaisser leur voiture s'il leur faut attendre 20 minutes pour l'arrivée d'un bus ou si l'on ne peut pas leur garantir que le dernier bus pourra les transporter.
Une hausse des tarifs injustifiée
Le scénario budgétaire prévoit une augmentation des recettes commerciales et laisse planer l'ombre de la suppression de la gratuité pour les seniors, et de l'abonnement à 10€ pour les jeunes. Les élus écologistes ont toujours défendu la mise en place d'une tarification sociale, et interrogé la gratuité systématique pour les plus de 65 ans. Pour autant, la suppression du tarif jeunes entraînerait la disparition d'une mesure qui est excellente pour initier des comportements de mobilité vertueux.
Mais surtout, il serait inacceptable d'utiliser cet argument pour augmenter les recettes tout en diminuant l'offre de service pendant 10 ans.
Une promesse de campagne toulousaine qui pourrait coûter cher aux communes membres de Toulouse Métropole
Le plan de financement dévoilé laisse quand même perplexe. Il envisage une contribution de la Métropole à hauteur de 2,8 Milliards d'Euros d'ici 2030. La contribution de la collectivité augmenterait de 70 % en moins de 10 ans. Un effort financier significatif, qui mérite d'être salué mais qui pose de nombreuses questions qui seront à débattre prochainement : quelles évolutions sur le plan pluriannuel d'investissement ? Une hausse supplémentaire d'impôts sera t-elle programmée ?
Mais surtout, on peut anticiper la réaction des communes de Blagnac, et de Colomiers, que M. Moudenc appelle ouvertement à verser une contribution supplémentaire, alors qu'elles sont membres à part entière de la Métropole.
Une proposition d'autant plus surprenante qu'elle ne s'applique pas à la ville de Toulouse. Pire, la ville centre à supprimé la contribution supplémentaire en vigueur de 2008 à 2014 dès l'arrivée de la majorité de droite au Capitole !
Ainsi M. Moudenc impose t-il sa promesse de campagne à ses voisins en leur demandant de la crédibiliser financièrement.
Un débat public très attendu
Cet automne débutera un débat public sur la 3ème ligne de métro, au cours duquel les parties prenantes pourront développer des arguments pour mesurer les impacts de ce projet, et évaluer ses incidences sur le développement urbain de l'agglomération. Soyons assurés que les écologistes y apporteront leur contribution et s'attacheront à démontrer que la réalisation de cette infrastructure n'est souhaitable que si elle n'engendre pas la suppression des projets actuellement inscrits dans les documents d'urbanisme, ni un ralentissement de fait du développement des transports durant une décennie.